Portrait de Vincent Villette
Portrait de Vincent Villette© Stéphane Supplisson, DR, IBENS

Vincent VILLETTEBiologie

Jeunes Chercheuses et Jeunes Chercheurs (JCJC)

Physiologiste de formation, j’ai toujours poursuivi le même objectif : comprendre la dynamique cellulaire de réseaux de neurones in vivo en relation avec leur structure anatomique et leur fonction. J’ai tout d’abord positionné le cœur de ma recherche dans le contexte expérimental de la navigation spatiale. J’ai étudié dans le contexte physiologique et pathologique (Alzheimer, épilepsie) les activités du réseau hippocampique qui sous-tendent les fonctions mnésiques. En utilisant la microscopie biphotonique, nous avons entre autres découvert que l'aire CA1 de l'hippocampe pouvait représenter la distance parcourue par l’animal en l’absence d’indices extéroceptifs sous la forme de séquences d’activité. Nous avons aussi pu identifier des structures dans l’activité neuronale, des assemblées neuronales orthogonales, qui forment des briques élémentaires sous-tendant les fonctions de l’hippocampe pour la représentation de l’espace et du temps. Ayant rejoint l’équipe de Stéphane Dieudonné à l’Institut de biologie de l’École normale supérieure, je cherche maintenant à comprendre comment s’articule l’activité multi-unitaire des microcircuits du cervelet dans un contexte de mouvements spontanés et complexes en me focalisant sur leurs relations spatiales et temporelles.

Projet MuVRICC

Le traitement efficace des informations perçues lors de l’exploration d’environnements complexes requiert de recoder des informations sensori-motrices similaires dans des patrons d’activité neuronale bien distincts. Dans le cortex cérébelleux, cette séparation de patrons est assurée par des millions de cellules granulaires au sein de la couche granulaire. Selon la théorie dominante, la séparation s’effectue par simple expansion combinatoire suivie d’un seuillage sélectionnant les cellules granulaires les plus actives.

Les cellules de Golgi, qui constituent la source d'inhibition des cellules granulaires, sont supposées générer ce seuillage de manière uniforme, par court-circuit inhibiteur. Or, ce fonctionnement simpliste est peu à même d’assurer une séparation optimale, qui ne soit pas dominée par les entrées les plus actives. Dans ce projet, nous proposons de tester l’hypothèse selon laquelle la diversité neurochimique des cellules de Golgi, ainsi que leur contrôle par des circuits excitateurs et inhibiteurs dédiés, pourrait optimiser les processus de séparation de patrons, en fournissant un contraste inhibiteur structuré finement en fonction du contexte d’exécution motrice et de retour sensoriel. Nous porterons une attention particulière au rôle des boucles synaptiques réentrantes sur les cellules de Golgi, que nous avons caractérisées au laboratoire.

L’impossibilité d’enregistrer les interactions synaptiques entre types cellulaires rares avec des électrodes chez l’animal vigile a jusqu’à présent limité notre compréhension des capacités des microcircuits neuronaux, comme la séparation de patrons. Nous avons récemment développé des méthodes innovantes de microscopie multiphotonique d’accès aléatoire ultra-rapide qui, combinées à l’utilisation d’indicateur de voltage génétiquement encodés, permettent d’enregistrer le potentiel de membrane de plusieurs cellules génétiquement identifiées simultanément chez l’animal en comportement. Cette technologie révolutionnaire nous donne un accès sans précédent aux enregistrements optiques simultanés des cellules de Golgi et de leurs circuits présynaptiques de contrôle lors de tâches motrices.

Notre étude devrait révéler différents mécanismes par lesquels un réseau inhibiteur peut mettre en œuvre une opération de séparation de patron optimisée, par la mise en forme spatiale et temporelle de l’activité des cellules qu’il contrôle.