Romy SanchezHistoire impériale des migrations et des exils
Romy Sanchez, historienne spécialisée dans l'histoire impériale des migrations et des exils entre l'Europe et l'Amérique latine, est récompensée par la médaille de bronze du CNRS pour ses travaux sur les migrations politiques cubaines du XIXe siècle et ses recherches sur les oppositions aux émancipations dans l'espace caribéen. En explorant les archives espagnoles, cubaines et américaines, elle a mis en lumière les ambivalences des exilés cubains face à l'esclavage et à l'indépendance, offrant une nouvelle lecture de cette période complexe. Ses recherches actuelles, menées au laboratoire Mondes Américains (CNRS / EHESS), sur les liens entre l'empire espagnol et l'expansionnisme états-unien continuent de redéfinir notre compréhension de l'histoire impériale. Depuis son entrée au CNRS, en 2018, elle explore aussi l'histoire socio-politique et intime des « oppositions aux émancipations » dans l'espace caribéen du XIXe siècle.
Membre du laboratoire Mondes américains après un passage à l'Institut de Recherches Historiques du Septentrion (IRHis, CNRS / Université de Lille) et à la Casa Velázquez, à Madrid, Romy Sanchez s’intéresse à l’histoire des circulations politiques au sein de l’empire espagnol et aux migrations euro-américaines au XIXe siècle. Son attrait pour l’histoire de l’Amérique latine et de la Caraïbe lui vient de ses racines familiales : « Mes deux parents sont cubains, exilés en France depuis les années 1980 ».
Dans le prolongement de sa thèse soutenue en 2016, « Quitter la Très Fidèle. Exilés et bannis au temps du séparatisme cubain, 1834-1879 », récompensée en 2017 par l'Institut des Amériques, ses recherches portent sur l’histoire sociale et politique d’un mouvement séparatiste. Elles proposent une réflexion plus large sur le nationalisme, le conservatisme et la permanence de composantes d’Ancien Régime dans le monde caribéen post-révolutionnaire. Romy Sanchez montre que « les migrations politiques sont loin d’être univoques et que les exils ne sont jamais uniformes dans leur tendance politique ». Ses travaux nuancent ainsi les stéréotypes de l'exil révolutionnaire et de l'histoire patriotique cubaine « qui raconte souvent l’histoire d’une île qui se bat, sur le terrain et via ses exilés, pour une libération totale et radicale, alors que ce n’est pas toujours le cas ». Elle aborde également les notions de pro-esclavagisme et de loyalisme, ainsi que les tentatives de ré-annexion de territoires libérés par les guerres révolutionnaires dans les Amériques anciennement espagnoles.
Romy Sanchez intègre ses recherches dans une histoire inter-impériale des oppositions aux émancipations dans la Caraïbe, au-delà de l'empire espagnol. Elle explore aussi les migrations en lien avec la famille et l'intimité à travers le programme FAMEXIL (Institut Convergences Migrations). Pour elle, « narrativiser l’histoire socio-politique permet de mieux la comprendre, et de mieux l’expliquer. J’aime faire de l’histoire avec des trajectoires et des ‘vies minuscules’, même si cette mode a ses limites et ses détracteurs ». Engagée dans des comités éditoriaux, elle développe de nouveaux projets collectifs, comme un échange académique franco-cubain ou des ateliers d’histoire contrefactuelle et d’histoire des objets en milieu scolaire.