Yukako Kezuka et Rostislav Oreshko, lauréats des prix Marie Curie 2021
Cette année, deux chercheurs de la circonscription Paris-Centre ont remporté les bourses Marie Sklodowska-Curie Actions (MSCA). Découvrez leurs recherches récompensées !
Yukako KEZUKA
Yukako Kezuka est mathématicienne à l'Institut de mathématiques de Jussieu - Paris Rive Gauche (IMJ-PRG, CNRS/Sorbonne Université/Université de Paris), mène le projet "IwCMEBSD".
Projet "IwCMEBSD"
La conjecture de Birch-Swinnerton-Dyer fait partie des problèmes du prix du Millénaire et est largement considérée comme l'un des problèmes ouverts les plus importants et les plus difficiles des mathématiques modernes. Elle concerne les courbes elliptiques, qui sont indispensables dans la société actuelle car elles sont largement utilisées sous forme de cryptographie, rendant possible la communication et le commerce en ligne sécurisés. La théorie d'Iwasawa est une méthode extrêmement puissante pour étudier cette conjecture. Elle sert de pont entre les deux objets mathématiques mystérieux apparaissant dans la formule de Birch-Swinnerton-Dyer (le groupe de Tate-Shafarevich et la série L complexe) qui sont de nature complètement différente, en décomposant la formule en une partie p pour tous les nombres premiers p. Afin de vérifier la conjecture complète pour une courbe elliptique, la partie p de la conjecture doit être vérifiée pour tous les nombres premiers p. En raison de graves difficultés techniques, la théorie classique ne peut traiter que les nombres premiers impairs et ne parvient pas à obtenir le cas le plus intéressant, la partie 2 de la conjecture, pour toute courbe elliptique. Le projet de Kezuka explore et applique les nouveaux outils qu'elle a développés dans la théorie d'Iwasawa afin d'inclure le cas négligé pour une large classe de courbes elliptiques. Cela a des conséquences importantes pour l'arithmétique des courbes elliptiques et ses applications.
Rostislav ORESHKO
Rostislav ORESHKO est historien et linguiste au laboratoire Orient et Méditerranée (CNRS/Université Panthéon-Sorbonne/Sorbonne Université/Collège de France/EPHE), mène le projet "Balkan Peoples".
Projet "Balkan Peoples"
Le projet est axé sur le phénomène de la migration des peuples balkaniques en Anatolie entre la fin du deuxième et le début du premier millénaires av. J.-C. Ce phénomène a eu des répercussions importantes sur la région allant de la mer Égée à l’ouest à l’Arménie et la Mésopotamie à l’est, y provoquant des changements majeurs dans sa composition ethnique, la langue, les croyances religieuses et la culture matérielle. Les Phrygiens sont les migrants d’origine balkanique les plus connus, mais ils n’étaient qu’un des éléments du mouvement migratoire d’envergure plus grande qui se déroulait en plusieurs vagues. Ce mouvement a apporté également en Anatolie une partie considérable de la population de la Mysie, la Lydie, la Paphlagonie, la Cappadoce et de l’Arménie, ainsi que, un peu plus tard, les Thraces de la Bithynie, qui ont assimilé la population précédente de la région – des peuples apparentés aux Hittites et Louvites – ou l’ont repoussée dans les parties montagneuses du sud de l’Anatolie et en la Syrie.
Hormis les Phrygiens et les Lydiens, aucun de ces peuples n’a laissé de textes écrits dans leurs propres langues. Les seules sources d’information à notre disposition sont les récits lapidaires des auteurs grecs, les mentions sporadiques éparpillées dans les textes cunéiformes et louvites hiéroglyphiques et les noms propres préservés dans les inscriptions grecques de la région. Ces circonstances rendent délicate la reconstruction en détails du phénomène de la « balkanisation » de l’Anatolie. Pour approcher ce matériel divers et dispersé, ce projet adopte une perspective interdisciplinaire qui réunit les méthodes des études classiques, d’hittitologie, de la sociolinguistique et la linguistique comparée, d’épigraphie et, à un certain degré, d’archéologie. On espère que la réalisation du projet produira une image du panorama ethnoculturel de l’Anatolie antique plus détaillée et équilibrée et contribuera à une meilleure compréhension des mécanismes de l’interaction et des échanges culturels dans toute la Méditerranée orientale.